RetailTech: comment Israël entend révolutionner la grande distribution et le e-commerce

Cynthia Phitoussi
4 min readFeb 5, 2020

Vous est-il déjà arrivé, après avoir fait vos courses, d’être soudainement découragés par la file d’attente et d’abandonner chariot et victuailles au supermarché ? Sachez que vous n’êtes pas seuls : chaque année, plusieurs milliards de dollars sont perdus rien qu’aux États-Unis en raison de trop longues files d’attente. Exaspérés, vous vous êtes surement demandé : et s’il y avait un moyen d’entrer dans un magasin, faire ses courses, et partir sans faire la queue ? Tout simplement.

Il y en a un. Mais ce n’est pas aussi facile que cela en a l’air. Alors que beaucoup se demandent comment réduire les files d’attente, le géant américain Amazon les a entièrement supprimées, avec l’ouverture au public de son premier magasin sans caisse à Seattle en janvier 2018. Bienvenue dans le monde d’Amazon Go. Dans le monde de la computer vision, des algorithmes de deep learning, de la sensor fusion, du geofencing et du virtual cart. En un mot : adieu aux files d’attente, adieu aux caisses, adieu aux accès de politesse.

Malheureusement, en supprimant les inquiétudes des consommateurs, Amazon a distillé une nouvelle frustration, celle des détaillants. Les magasins Amazon Go sont construits autour d’une technologie particulièrement coûteuse et les chaînes de supermarchés existantes ont bien du mal à offrir une expérience semblable à leurs clients. Ils devront procéder à de lourds ajustements infrastructurels, tels que l’installation de capteurs et de centaines de caméras.

Contrairement à l’idée reçue, encore aujourd’hui, seulement 10% du chiffre d’affaires mondial du commerce de détail provient de la vente en ligne. Ainsi, le principal défi est de révolutionner les canaux traditionnels que sont les supermarchés physiques, une industrie vieillissante et en proie aux pressions du marché numérique qui a profondément modifié les attentes et préférences des consommateurs.

En collaborant avec des start-ups israéliennes innovantes, les acteurs traditionnels accèdent à de nouvelles technologies RetailTech qui accélèrent leur processus de modernisation. Selon une étude menée par Deloitte, les détaillants du monde entier ont investi 6,2 milliards de dollars dans l’installation de technologies israéliennes en 2018.

Fervent compétiteur d’Amazon Go, la start-up Shopic a par exemple développé une technologie de vision par ordinateur qui détecte automatiquement ce que les clients déposent ou retirent de leur caddy, et leur permet de payer directement depuis une application mobile sans faire la queue. Toutefois, derrière la reconnaissance visuelle se cache un effort humain non négligeable, ce que la start-up Dataloop entend simplifier. À mi-chemin entre l’expérience d’achat traditionnelle et l’utopie amazonienne, cette approche est nettement plus rentable et extensible à tout type de supermarché. Quant aux inquiétudes légitimes en termes de sécurité, Shopic a développé un système unique pour détecter les fraudes : « Nous utilisons l’intelligence artificielle pour surveiller les comportements des clients lorsqu’ils utilisent notre plateforme, et nous pouvons signaler les transactions irrégulières », explique Raz Golan, fondateur et dirigeant de Shopic. D’autres start-ups, comme Riskified, entrée dans le club des licornes israéliennes début novembre, ont également développé des technologies anti-fraude adoptées par les sites de e-commerce.

Si le souci d’une expérience d’achat optimale motive bon nombre de start-ups, il s’agit en réalité d’une branche précise d’une industrie RetailTech qui a attiré 428 millions de dollars d’investissement en Israël en 2018, sur 6 milliards investis à l’échelle mondiale. Forte de son image de Start-Up Nation, le pays a développé une expertise technologique qui fournit les outils nécessaires pour personnaliser les opérations d’achat et améliorer les prévisions et la planification des ressources.

Sur la toile, c’est un autre challenge auquel les vendeurs sont confrontés : aider les clients à trouver rapidement ce qu’ils recherchent. « De plus en plus d’acheteurs ont du mal à trouver ce qu’ils veulent dans l’océan de produits qu’offre le commerce en ligne », explique Liat Zakay, fondatrice et dirigeante de Donde Search, une plateforme permettant aux détaillants de réagir plus rapidement aux tendances, réduire les frais d’exploitation et raccourcir le temps d’achat grâce à l’intelligence artificielle et la vision par ordinateur. « Notre objectif est de changer la façon dont les consommateurs cherchent leurs produits en ligne, grâce à des représentations visuelles telles que le motif d’une chemise ou la coupe d’un pantalon, qu’il serait difficile de décrire par des mots. »

Comme dans la majorité des secteurs, la donnée est reine et la capacité des entreprises à obtenir des informations sur leurs clients afin de personnaliser leurs produits est essentielle pour survivre. Connue pour sa stratégie de « glocalisation », la chaîne de restauration rapide américaine McDonald’s a racheté en mars la start-up israélienne Dynamic Yield pour 300 millions de dollars, afin de personnaliser les écrans des points de vente « drive ».

Les success-stories ne manquent pas : de l’approvisionnement à la vente, en passant par le marketing et l’inventaire, les start-ups israéliennes révolutionnent l’ensemble de la chaîne logistique et contribuent à construire le commerce du futur, online comme offline.

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Cynthia Phitoussi

Managing Partner at SeedIL Ventures, also founder and manager of SeedIL Club. Expert in seed funding in Israeli startups.